Je vais peut-être me répéter ici, car dans le fond le thème que je vais aborder est sensiblement le même que j'avais abordé dans ce billet : http://anarhilisme.blogspot.com/2010/10/la-derive.html. Toutefois ce n'est pas un sentiment qui est facile à rendre et ce n'est pas un sujet qui est beaucoup abordé, voir ce n'est pas un sujet qui est abordé du tout. Cela relève peut-être trop du vécu personnel pour être partagé en tant qu'expérience humaine. En même temps cela ressemble à ce que Camus appelait le sentiment d'exil dans son propre pays, un exil sans terre de retour. Ou du thème de l'étranger (étranger au monde et à la société). Je présume que c'est le genre de chose que plusieurs vivent, mais à leur façon, sans pouvoir le partager avec les autres, car les gens le vivent séparéEs les unEs des autres et à leur propre façon. Je crois quand même que le sentiment est plus intense et plus prolongé chez certaines personnes.
Je parle de la distance qui s'est installé entre moi et les autres. Entre moi et le monde. Pourtant à priori je suis quelqu'un de somme toute fort banal, qui passerait inaperçu un peu n'importe où. Du moins si on ne porte pas attention au fait que je ne fit pas dans le décors, que je suis toujours à part du groupe et que dans mon silence inquiétant, je ressemble à un tireur fou qui attend son heure. Bon j'exagère un peu, mais vous voyez le genre. Mais encore, ce n'est qu'un sentiment personnel. Je ne sais pas vraiment ce qu'est la perception des autres à mon endroit. Mais je ne crois pas être très apprécié des gens en général et je leur renvoi la pareille. Je ne les déteste pas forcément, mais est-ce que je les aime? Je ne pense pas. Pris à part, une fois de temps en temps peut-être. Un peu moins quand ils sont en mottons et que je les vois de façon répétitive.
Bon je présume que tout ça sonne terriblement mal, mais ma façon de percevoir les choses se comprend peut-être mieux si j'explique davantage d'où provient l'origine de mon point de vue, si négatif sur l'espèce humaine et sur la vie en général. Disons que c'est comme si je me situais de l'autre côté d'un miroir. Le monde réel se trouve de l'autre côté et le monde dans lequel je me situe est froid et inhabité (en dehors de moi-même). Je peux voir le monde réel (celui dans lequel tout le monde évolue) et je peux le percevoir en partie avec le reste de mes sens, mais il me demeure totalement inaccessible. Je suis prisonnier de l'autre côté du miroir et je n'arrive pas à briser la surface dure qui me sépare du reste des gens, du monde et de la vie.
Dans le fond ce n'est pas tant que je n'aime pas les gens, je n'aime pas le fait qu'ils m'échappent et me soient inaccessibles. La communication est extrêmement laborieuse. Du moins elle demande beaucoup de temps et de patience. La plus part des gens n'ont ni le temps, ni la patience nécessaire.
Je crois bien que ce soit à moi de me sortir de cette position fâcheuse et de passer de «l'autre côté» du miroir, mais ce n'est pas évident. Plus facile de s'en prendre à quelque chose de tangible et de matériel qu'à des barrières psychologiques et émotionnelles. Tout ça relève de l'insaisissable et je ne crois pas avoir déjà réussi à expliquer ce phénomène à quelqu'un d'autre. Je ne suis pas certain de le comprendre moi-même. Et bien que je sache que je doive passer de l'autre côté, je ne suis pas certain que je serais bien accueilli, une fois rendu parmi mes semblables.
Il faut aussi envisager le fait qu'on préfère que je reste de mon côté et qu'à la limite, ce sont les gens que je voudrais rejoindre qui m'y ont enfermé.
dimanche 2 janvier 2011
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6 commentaires:
Je crois que tu réussis bien à l'expliquer ou du moins à illustrer un peu ta situation au niveau social. Je pense que ta réflexion ne sera pas vaine et qu'à force d'explorer, tu trouveras un compromis.
En attendant, moi j'aime bien te "fréquenter" via tes écrits. :-)
J'ai oublié par contre de mentionner comment ça avait pu jouer un rôle dans mon attrait envers le nihilisme (qui est un peu burlesque, je l'admet), mais je présume que l'on peut deviner.
J'aime bien aussi te «fréquenter» par l'entremise du web, même si ça fait un peu bizarre de dire ça.
C'est très personnel et franchement touchant ce que vous écrivez-là.
Puis-je me permettre une anecdote ou deux? Je porte une grosse tuque «singe», je veux dire que ma tuque a l'air d'une grosse marionnette ouistiti, qui sourit. C'est assez incroyable comme les gens réagissent positivement à ce gros sourire. Les filles me regardent dans la rue et rigolent, les enfants sont fascinés, les vieux ont un sourire en coin. Les chauffeurs d'autobus me sont sympathique.
Est-ce vraiment le ridicule? Non, c'est que la tuque sourit, un gros sourire large et rouge.
Pourtant je suis moi-même un être assez austère, je n'ai pas de télé, je passe mon temps à lire et à écrire, mais justement, quand je rencontre des gens, j'ai remarqué qu'être plein de bonnes intentions à leur égard leur permettait d'être sympathiques envers moi.
L'été, je suis à vélo et je porte donc un casque vert-lime lui-aussi très voyant. Comme je ne prends pas toujours la peine de l'enlever lorsque je fais des courses et j'ai droit à la même réaction. Comme tout le monde est sympathique, même quand j'enlève tuque et chapeau, je garde par devers moi leurs sourires et je souris aussi.
Je souris particulièrement envers les anonymes, les caissières «un peu moches», les vieux monsieurs. Si dans un bus terne je vois une dame un peu pognée, sur le banc d'en face, je lui souris. Si vous voyiez leurs visages... Il change et cela vous fait justement l'effet d'une solidarité. Vous parliez de Camus, c'est un peu ça, nous sommes tous dans la peste, mais rien ne nous interdit de nous apporter un peu de réconfort.
Le fait qu'il s'agisse d'actes gratuit me semble encore plus important. Vous ne reverrez pas cet inconnu dans le train, qu'avez-vous à perdre à exprimer simplement votre humanité par une légère reconnaissance?
J'ai en quelque sorte intériorisé le ouistiti de la tuque et croyez-moi, cela fait une différence. Je ne crois pas aux théories ésotériques mais je suis certains que l'on détecte d'une manière sans doute inconsciente les intentions d'autrui.
Éprouver des intentions bienveillantes reposes et les exprimer (sans parler) calme l'environnement social, le détend.
Cela change les autres et les rend moins hostile.
Maintenant, pas obliger de prendre le ouistiti, le zèbre est très bien et la girafe aussi. ;)
j aurais bien aimé lire ça avant le mail que je t ai ecris hier...
Pas grave on se reprendra... de toute evidence plein de choses a bavaser devant une biere ou un chocolat chaud.
belle ecriture cher
Je viens de vous répondre ma chère. Je m'excuse d'avance pour la fin en bleu. Ce genre de chose m'arrive toujours....
Votre réflexion est bien personnelle. Je pense que de plus en plus d'individus se sentent seuls voir même exclus. Personnellement, je blâme la gestion mercantile du monde, qui dénature l'être humain. Plus rien ne nous appartient aujourd'hui, mis à part une petite parcelle de terre et un logement. Tout le reste appartient nécessairement à quelqu'un d'autre, à une organisation ou à un État. Lorsque l'économie était moins centralisée, on se sentait chez-nous n'importe où et on se sentait à l'aise d'aller échanger avec un voisin, même lointain et à l'aider dans une tâche. La centralisation de l'économie et de la politique dépossède l'individu, crée un sentiment d'exclusion et d'impuissance. Je pense sincèrement que nos états psychologiques sont pour la plupart les répercussions de nos vies économiques. Cela est ma contribution amicale.
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